Il y a peu, je discutais avec une rencontre d’Instagram, et elle me disait à quel point elle réalisait qu’on ne se connaissait pas vraiment. Nos engagements affichés sur Instagram nous ont permis d’échanger et les publications donnent une idée de nos personnalités, de nos familles, mais ce n’est toujours qu’un trou de serrure sur nos vies. Même pour les plus actives et qui partagent de nombreux moments de vie, cela reste une simple fenêtre sur un monde inconnu IRL.
Cela m’a rappelé un sentiment d’il y a quelques années, lorsque professionnellement j’avais participé à l’organisation d’un évènement franco-américain pendant lequel se tenaient des ateliers avec des invité·es américain·es qui lorsqu’iels se sont présenté·es, ont commencé par dire qu’iels étaient des compagnon·nes et des parents, avant d’être tel ou tel métier. A l’inverse, les Français·es se présentaient quasi exclusivement par leur métier et leur rôle dans leur structure.
Cela dénotait déjà de quelque chose dont je pense prendre la mesure petit à petit. Sommes-nous nos engagements ? Nous définissent-ils ?
Mes engagements
Aujourd’hui si on me demande de me définir, je suis notamment :
- Française, née en France, avec des origines asiatiques, mais pas que : Je suis Française par filiation et droit du sol. Mon père est né en France et ma mère, bien que née sur un sol colonisé français, a été naturalisée en France à un prix que seul·es les immigré·es peuvent connaître.
- Asioféministe : Je suis une femme cisgenre qui porte un asioféminisme intersectionnel, décolonial, antiraciste, en colère contre un sexisme et un racisme systémiques qui m’imposent de porter des étiquettes plutôt que d’être juste moi. J’aimerais également développer un asioféminisme beaucoup plus écologique et réellement lutter contre le capitalisme. La déconstruction est toujours en cours…
- Grosse : Je suis obèse et dans ma tête, je l’ai été toute ma vie. Or comme pour beaucoup de gros·ses, je n’ai jamais été aussi grosse. Les raisons sont multiples mais dans une société grossophobe, il devient indispensable d’en parler.
- Alliée : Je suis hétérosexuelle, neurotypique, non porteuse de handicap. Je me veux une alliée des luttes LGBTQ+, TDS, anti-validistes…
- Maman : Je crois profondément en l’éducation pour changer les systèmes de domination notamment patriarcal avec l’éducation des garçons, qui sont selon moi les grands oubliés des mouvements d’éducation féministe. Maman, à l’inverse des autres substantifs, n’est pas forcément être invisibilisée sur le plan politique, mais c’est être reléguée au second plan et être coupable de tout.
Mais est-ce vraiment moi ? Sont-ce des substantifs ou des caractéristiques parmi d’autres qu’il faut afficher sous peine d’être invisibilisée ?
Ma personnalité
Je suis engagée mais je ne suis pas mes engagements. Est-ce que cela veut dire quelque chose ? Peut-on réellement séparer la femme de ses engagements comme certain·es séparent l’homme de l’artiste ?
Comme pour de nombreuses personnes, j’ai une personnalité multiple. En fonction de la personne à qui vous demanderez, de la période et du contexte dans lequel elle m’aura connue, cela sera surement différent.
Bien qu’assez entière avec ce que les gens peuvent considérer comme une grande gueule, je suis une personne qui s’adapte très bien à son environnement. A fortiori professionnellement, je tiens la route en porte-à-porte dans des immeubles de quartiers populaires, en discussion avec des directeurices de palaces parisiens, ou encore en animation d’ateliers avec des inconnu·es.
Une fois rentrée, je suis une personne très solitaire – voire sauvage – qui aime son calme et trainer en pyjama toute la journée devant des séries ou avec un bon bouquin. Et malgré tout ce qu’on peut voir de moi, je dis souvent que « je n’aime pas les gens ».
Bref, je suis une personne, pas une ressource…
Avoir les yeux ouverts est un sacré poids à porter,
mais je sais que les laisser fermés est encore plus lourd.
2 commentaires sur “Suis-je mes engagements ?”