HPI asiatiquetée

Tu le vois le problème ? Tu les vois tous les stéréotypes et préjugés qui fusent ? Parce que moi, cela fait plus de 30 ans et j’ai bien envie de briser ce cercle vicieux. Je ne suis pas psy, juste concernée et en questionnement.

Quelques définitions

Revenons d’abord sur quelques définitions.

Neuroatypie

En opposition à la norme neurologique dominante, neurotypique donc, ce terme a d’abord été inventé par et pour les communautés autistiques afin de nommer cette différence.

Aujourd’hui, il englobe les fonctionnements neurologiques qui ne rentrent pas dans cette norme : troubles du spectre autistique (TSA), troubles dys, troubles déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH), et haut potentiel intellectuel (HPI).

Haut potentiel intellectuel

Bien qu’en réalité ce soit plus complexe que cela, l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) considère qu’une personne est Haut Potentiel Intellectuel dès que son quotient intellectuel (QI) est supérieur ou égal à 130. On parle de 2% de la population qui serait surdouée, précoce, douée, haut potentiel, zèbre… Tous ces termes sont des synonymes qui portent plus ou moins de stéréotypes et de préjugés. J’en reste à HPI qui est le terme scientifique actuellement validé, et selon moi le plus neutre.

Malgré toute la métaphore que je comprends, je ne me reconnais pas du tout dans la dénomination “zèbre” car en tant que personne racisée, je ne supporte plus aucune comparaison animale, objectivante et a fortiori exotisante. Il s’agit là pour moi d’un impensé, d’un biais raciste, des études psy au sens très large, menées par des auteurices blanc·hes.

Asiatiquetage

Selon le glossaire du collectif FéminAsie, il s’agit d’un mot-valise qui permet d’appréhender l’un des aspects du racisme anti-Asiatiques, le fameux « Vous vous ressemblez tou·tes ». Il s’agit du fait d’être perçu·e (étiqueté·e) comme asiatique selon certains critères physiques : posséder une certaine forme d’yeux, de nez, de visage, avoir des cheveux noirs et lisses, etc.

Et lorsqu’on est asiatiqueté·e, on est systémiquement associé·e à la minorité modèle, ce mythe essentialisant et aliénant qui n’est là que pour servir le racisme.

Des étiquettes en plus ?

Certain·es d’entre vous pensent peut-être qu’il ne s’agit que de mots qui au final ne font qu’ajouter toujours plus d’étiquettes pour nous enfermer. Mais il est ici moins question d’étiqueter que de nommer des vécus et des ressentis qui ont mis les personnes concerné·es de côté, jusqu’à parfois la marge de la société.

Car les étiquettes en réalité, ce sont les attendus neurotypiques qui ont déjà apposé sur nos têtes une longue séries de jugements de valeur.

Ouh, l’intello ! Hey Miss je-sais-tout ! Toi t’es un génie ? Prouve-le ! Pourquoi tu ne restes pas avec les enfants de ton âge ? T’es pénible à vouloir tout comprendre… Arrête de tout remettre en question ! Tu parles d’une surdouée ! Pourquoi, pourquoi, pourquoi, je vais t’en donner du pourquoi ! Qu’est-ce qu’elle est têtue, toujours à n’en faire qu’à sa tête… Tu vas quand même pas te plaindre d’être un petit génie ?! De toute façon, c’est que lorsque ça t’intéresse… Ça va les chevilles, à toujours vouloir faire mieux que tout le monde ? Qu’est-ce que tu peux être sensible… Tu veux pas écouter pour une fois ?! Non mais il s’arrête jamais ton cerveau ?

Parce qu’on ne nomme jamais la norme, cela laisse croire que nommer la différence nous enferme. Mais en réalité, cela nous libère, nous conforte dans nos identités, et permet par opposition de dénoncer cette norme…

De l’intuition au diagnostic

Après un long travail sur moi-même, sur mes traumas, et sur ma déconstruction, je me rends compte aujourd’hui que ce qu’on a appelé pour moi « des facilités » a toujours été davantage lié à ma couleur de peau supposée et à mon genre assigné, qu’au fonctionnement neuroatypique de mon cerveau. Oui, dans la construction raciste collective, les Asiatiques forment une race qui met son intelligence au service de sa fourberie et de sa ruse, mais qui ne dupera pas longtemps la race blanche plus maligne. Oui, dans la construction sexiste collective, les enfants socialisé·es filles apprennent à tellement bien se tenir, à se fondre dans le moule et à être si discrèt·es qu’un neuroatypisme est d’autant plus difficile à diagnostiquer.

Je n’avais pas conscience de ça quand je suis devenue maman. L’antiracisme, l’éducation non-genrée, j’avais bien d’autres sujets en tête. OK c’est un bébé tonique, et alors ? OK les trop pleins d’émotions sont violents, mais comme beaucoup d’enfants, non ? OK dès 18 mois il s’exprime en phrases et avec des mots de 5 syllabes, mais ça arrive, non ?! OK il est passionné par l’univers et sa création, ça arrive, non ?! Tous les enfants se développent à leur rythme, ou pas…

Chez la nounou, ça passe. Des enfants comme Bout’Chou, elle n’en a pas vu souvent et elle le suit et l’accompagne avec beaucoup de plaisir dans son amour de la lecture. C’est clair que l’encyclopédie 7-9 ans que lui récite Bout’Chou n’est pas dans les lectures habituelles ! Mais l’école c’est différent, ça ne se passe pas du tout comme dans un épisode du bus magique ! Non, non, non !

Dans une classe de 25 élèves, tu dois t’adapter, vivre en société, développer tes habilités sociales ! Bout’Chou adore, sauf que pour lui, la moindre règle doit être expliquée, justifiée, remise en cause parfois juste pour être sûr qu’il n’y a pas d’autres moyens, ou pour s’assurer que la personne en face sait ce qu’elle fait. Et quand à côté d’autres mangent de la pâte à modeler, se roulent dans la peinture, et n’alignent que 3 magnifiques « beurk beurk beurk », ce n’est pas tous les jours facile…

Bref, apparemment tout cela ne semble pas très typique, alors, on a fait le test. Suite au prochain épisode !


2 commentaires sur “HPI asiatiquetée

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